Radiohead - In rainbows

 

Le voilà le tout nouveau Radiohead ! Tout chaud ! Oyez la masse, votre disque tant attendu est arrivé, vous pouvez être heureux et enfin vous ruer ! Ola, médias ! Sortez le tapis rouge et le porte-plume Mont Blanc©, la banquette en cuir et le Martini Rosso®, vous pourrez faire gicler votre encre et la faire dégouliner le long de critiques pompeuses écrites en cinq minutes concluent par un « CD indispensable pour Noël » fat et insipide.

 

Il faut dire que le sujet Radiohead, c’est du tout cuit : vu le nombre de fans dans le monde, on ne prend pas trop le risque de se faire taper dessus si on la ramène en criant à qui veut l’entendre que « Radiohead c’est géniaaaaaaaaaaaaal ! ». Par contre détester est interdit. Comment cela est-il possible ? Un groupe pareil… gentil et discret en plus… Pas mercantile, intègre quoi…Crime de lèse-majesté. Il n’y a qu’un connard qui n’y comprend rien qui puisse en être capable. Etonnant qu’il n’y en aie pas plus, d’ailleurs.

Bon, tu nous la sors, ta critique ? OK, alors :

Tout d’abord et pour commencer, Radiohead a (ou avais ? et si ça n’étais pas le cas ici ? Ah, ah,suspense…. Je te tiens lecteur, je te tiens !) la faculté de surprendre à chaque nouvel album depuis… bah le début en fait. Depuis The Bends, le 2ème album donc, le rock et l’électro s’enchevêtrent pour créer une texture acoustique chaque fois nouvelle, plus ou moins heureuse d’ailleurs, parce qu’entre nous, je continue à détester OK Computer justement parce que j’y trouve le mélange super mal fichu, la mayonnaise ne prend pas et ça forme de gros grumeaux gerbeux. Certains diront « ‘tain, il a rien compris, celui-là », mais oui, et pas la peine de répéter « il faut que tu le réécoutes, mon vieux, tu verras, il est tout simplement… géniaaaaaaaaaaaaal ! » parce ce que c’est déjà fait et plus d’une fois d’ailleurs. Ce disque est gâché, c’est tout. Enfin je trouve.

 

Kid A et Amnesiac, complètement révolutionnaires par contre, sont la vitrine d’un Radiohead parti dans un monde parallèle (sans drogue ?) pour le plus grand bien de tous. Que pouvaient-ils nous réserver après le Hail to the Thief, sorte de disque-miroir du OK Computer, complètement maîtrisé pour le coup, qui devait signer le retour du groupe vers le rock ? De la jungle pop, des mélodies calmes et des envolées de guitare, en fait un peu de tout ce qui a fait Radiohead au fil des années, on croirait à une compilation de B-sides collectionnées depuis Kid A. Voilà, c’est ce qu’est cet album, visiblement rien de plus que des chansons qu’on aurait laissées de coté puis qu’on aurait retravailler plus tard, à un autre moment, avec autre chose en tête et dans d’autres conditions. Des titres pour plus tard, quand on n’aura plus rien d’autre sous le coude. Pas que cela soit un reproche, attention. Mais je trouve qu’on sent réellement la différence de travail. Est-ce bien ou mal ? C’est différent, voilà tout. C’est presque une rupture, et ce pour au moins deux raisons.

 

D’une part, ce disque est moins grave que les albums précédents. Il semble au contraire que pour la première fois Radiohead se soit débarrassé d’une chape de béton qui donnait une allure dramatique à chacun de leur disque. ‘’All I Need’’ et ‘’Videotape’’ exceptés, on serait même presque dans la légèreté.

Ensuite, on est moins dans le Radiohead de d’habitude. Dans le genre balade folk, ‘’Faust Arp’’ est très belle certes, mais elle est loin d’être inventive, et pour ainsi dire, sonne assez fade, tout comme ,à la réflexion, une ‘’Videotape’’ qui est une triste façon de conclure l’album, dans les deux sens du terme. ‘’House of Cards’’ est très aérienne, mais a des airs de déjà entendus genre : « mais bon sang où est-ce que j’ai déjà entendu ce vocal d’intro ? ».

 

radiohead in rainbows2

 

Quoi ? Il n’y aurait donc rien de valable dans ce fichu truc ? Est-ce c’est ce que j’ai dit ? Il n’est pas pourri cet album, loin de là même. Par exemple, dans le genre BO qui aurait pu mal tourné, ‘’Nude’’ se pose là, sauf qu’au lieu de quoi le titre amène une douce tension, instaure un sentiment d’attente/détente mêlé d’un sens de la mélodie purement Radioheadien (fallait bien que je lâche le mot un jour ou l’autre). Pareil, ’’All I Need’’ avec sa ligne de synthétiseur sonnant comme une basse, très grave, pour devenir progressivement un piano au deuxième couplet, est à la fois calme et inquiétante, se développe et s’épand pour terminer dans une orgie de cymbales.

 

Ce qui sauve In Rainbows en fait, c’est tout simplement la touche Radiohead apportée comme une valeur ajoutée indéniable. Ca fait petit fanatique de l’écrire, mais c’est vrai. Ce qui le met en danger est justement le fait que le groupe a pris moins de risques, il est sorti du terrain glissant. A quoi pourrait se résumer In Rainbows ? A un simple disque pop, de bonne facture certes, mais qui ne sort du lot que parce que Radiohead est écrit sur la pochette. Agréable à l’écoute, mais pas complètement renversant. Un plat pas extraordinairement orgasmique, mais un bon plat quand même. On ne va pas cracher dans la soupe, ni reprocher au groupe de ne pas être au même niveau de génie que ce à quoi il nous avait habituer. Ca s’appellerait de l’ingratitude, et pour tout dire, de la mauvaise foi. C’est juste le cadeau idéal à faire pour Noël, les mecs !

 

2007 - XL Recordings